Les objectifs de la formation de basketball féminin : une qualification olympique et contribuer à l’essor du sport
Dire que la force d’une équipe réside dans la somme de ses athlètes est peut-être une évidence. Ce n’est toutefois pas là le message que Natalie Achonwa, qui a participé à trois Jeux olympiques cherche à transmettre quand elle décrit l’équipe féminine canadienne senior de basketball.
Ce qu’elle veut plutôt dire, c’est que « la meilleure performance du jour peut venir de n’importe laquelle d’entre nous. Je pense que le fait que nous ne sommes pas obligées de nous fier constamment à une ou deux personnes [en tant que joueuses vedettes] représente hors de tout doute une de nos forces, et c’est le cas depuis un bon moment maintenant. »
Achonwa est bien placée pour le savoir parce qu’elle est dans les parages depuis un bon moment. L’athlète de 31 ans a écrit une page d’histoire en 2009 quand elle est devenue la plus jeune joueuse à être sélectionnée au sein de l’équipe nationale canadienne senior. Elle n’avait alors que 16 ans. Achonwa joue actuellement dans les rangs professionnels avec les Lynx du Minnesota dans la WNBA.
La capacité d’Équipe Canada à rapidement développer une chimie et la stabilité que procure le fait d’avoir un solide noyau de joueuses d’expérience a permis de venir à bout du fait que les joueuses passent de moins en moins de temps ensemble avant les tournois. Plusieurs membres de l’équipe nationale senior évoluent au sein d’équipes de la WNBA ou dans des ligues outre-mer.
« Nous profitons de chaque occasion que nous avons d’être ensemble et nous essayons d’en tirer le maximum », affirme Nirra Fields, qui a participé à deux Jeux olympiques.
Tout fonctionne jusqu’ici. Équipe Canada n’a jamais cessé de rehausser son niveau de performance ces dernières années. Les Canadiennes cherchent actuellement à décrocher une place aux Jeux olympiques et si elles y parviennent, ce serait la quatrième fois de suite qu’elles s’y retrouveraient.
L’équipe a fini quatrième à la Coupe du monde de basketball féminin de la FIBA 2022, ce qui représentait le meilleur classement pour le programme depuis la troisième place enregistrée en 1986. Les Canadiennes ont raflé le bronze à l’AmeriCup féminine de la FIBA 2023, remportant ainsi une septième médaille dans les huit plus récentes éditions de cette compétition, séquence qui remonte à 2009.
Cette médaille de bronze leur a valu de se retrouver au tournoi de préqualification olympique de basketball féminin de la FIBA pour la région des Amériques, qui a eu lieu en Colombie au mois de novembre dernier. Équipe Canada y est allé d’un balayage à ce tournoi, obtenant ainsi sa place dans l’un des quatre tournois de qualification olympique de basketball féminin de la FIBA, qui seront disputés en février.
Le tournoi de préqualification olympique a été la première compétition où Achonwa, la capitaine de l’équipe canadienne, enfilait l’uniforme depuis la fin de son congé de maternité. Son fils Maverick, qui est né en avril, a fait le voyage avec l’équipe en Colombie.
« Il ne se souviendra peut-être pas qu’il était là, mais ça va être dans son album de photos. Je vais m’assurer qu’il connaisse toutes les anecdotes et les récits en rapport avec ce voyage, affirme Achonwa. C’est sûr que [retourner au jeu post-partum] est une des choses les plus difficiles que j’aie jamais faites. Ça me donne aussi de nouvelles forces de savoir que je peux continuer à persévérer, que je peux créer un être humain et ensuite revenir pour compétitionner au plus haut niveau. »
Le retour d’Achonwa a été un tonique pour Équipe Canada, tout comme le leadership de l’entraîneur Víctor Lapeña, un ajout relativement récent puisqu’il s’est amené à la tête de l’équipe en 2022. Achonwa estime d’ailleurs que la présence de Lapeña sied bien à l’équipe en partie parce qu’il a une « mentalité de papa ».
« Il va te mettre au défi, il va te dire tes quatre vérités et il va te forcer à être imputable. Il va aussi être ton plus grand partisan », explique Achonwa.
Sa coéquipière Laeticia Amihere se dit d’accord avec les propos d’Achonwa.
« Il a tellement d’énergie, tellement de passion et il a une vision très large des choses. Je pense qu’il voit un énorme potentiel en nous et il veut nous amener à atteindre ce niveau », dit Amihere qui, à l’âge de 22 ans, a déjà participé à une présentation des Jeux olympiques. Elle joue dans la WNBA avec le Dream d’Atlanta.
Lapeña a hérité d’un programme qui a beaucoup de profondeur en termes de talent et qui est composé d’un grand nombre de joueuses d’expérience, dont plusieurs sont passées par plus d’une quadriennale olympique et en ont donc retenu les leçons.
Pour la vétérane qu’est Achonwa, chaque expérience olympique l’aide à ajouter des outils qui lui permettent d’être de plus en plus utile à l’équipe.
« Pour Londres 2012, nous avions été la dernière équipe à nous qualifier et nous nous sommes qualifiées le jour de la fête du Canada, souligne-t-elle. Nous avions l’impression de nous être faufilées en douce et nous étions vraiment contentes juste d’être là.
« Ensuite pour Rio 2016, nous nous attendions à nous qualifier, ce n’était plus qu’un simple espoir. À Tokyo 2020, le mentalité c’était ‘une médaille ou rien’ et ça n’a pas nécessairement été utile comme approche. Je pense que c’est venu étouffer notre rêve. À la suite de toutes ces expériences, la leçon à retenir, c’est qu’il faut savourer le processus, se concentrer sur le processus et laisser le travail témoigner du reste. »
Quant à Fields, ses deux quadriennales olympiques lui ont laissé une impression similaire: « Ce que j’en retiens personnellement, c’est que le succès obtenu dans le passé ne garantit pas le succès futur. Il ne faut rien tenir pour acquis. Tous les Jeux olympiques sont différents et il faut le mériter. »
Pour les femmes d’Équipe Canada, il est important que leur parcours olympique comprenne aussi des éléments qui permettent de cultiver et de défendre les intérêts de la prochaine génération de joueuses.
« J’ai commencé à faire du sport parce que mes frères en faisaient, indique Amihere. Toutefois mes parents ne pouvaient se permettre financièrement qu’un autre membre de la famille pratique un sport. J’en ai eu l’occasion grâce à un entraîneur qui m’a dispensée de payer les frais. C’est là une chose à laquelle je pense souvent, il y a beaucoup de filles comme moi qui n’ont pas droit à de telles occasions. Tracer un chemin afin qu’elles puissent atteindre la WNBA ou jouer dans les rangs professionnels, ou simplement qu’elles aient l’occasion de faire de l’activité physique, de rencontrer des gens et d’apprendre des compétences essentielles, c’est très important. »
L’importance du mentorat est aussi un thème qui revient chez toutes les joueuses.
« J’ai commencé à jouer au basketball par hasard, explique Achonwa. Alors le fait d’avoir des gens pour me guider a été crucial dans le parcours qui m’a mené jusqu’ici aujourd’hui. C’est tellement enraciné dans le ‘pourquoi’ je joue, donc je fais tout ceci dans l’espoir que la prochaine génération ait droit à un parcours plus facile que le mien et que le basketball féminin soit en meilleure posture qu’au moment où j’ai commencé. »
Le plus souvent, les athlètes interagissent avec les jeunes sportifs dans le cadre de camps, d’ateliers et de conférences. Fields raconte qu’à l’occasion d’un camp tenu récemment, de jeunes espoirs l’ont bombardée de questions sur les façons de faire carrière au basketball.
« Il y a une demande de la part de filles qui veulent vraiment jouer, mais qui n’ont personne pour les orienter. J’ai le sentiment d’être en bonne position pour les aider à avancer à cet égard. »
Bien que les joueuses de l’équipe canadienne mettent toutes l’emphase sur la nécessité de soutenir les filles et les femmes qui jouent au basketball, Achonwa nous rappelle que la présence de ses coéquipières et elle n’est pas seulement importante pour les filles.
« Je veux que les jeunes filles s’identifient à nous, réussissent à accomplir toutes ces choses-là et repoussent les limites de l’impossible. C’est tout aussi important que les jeunes garçons voient des femmes dans ces rôles-là, qu’ils voient des femmes qui sont compétitives, qui ont du cran et qui sont des leaders fortes. C’est crucial pour amener la société là où elle doit être. »
Seize équipes participeront aux quatre tournois de qualification olympique de basketball féminin de la FIBA qui se dérouleront du 8 au 11 février. Étant donné que la France et les États-Unis se sont déjà qualifiés pour Paris 2024 en tant que nation hôte et championnes de la Coupe du monde de la FIBA 2022, respectivement, cela laisse 10 places de quota olympique en jeu.
Équipe Canada disputera le tournoi de qualification organisé à Sopron, en Hongrie. Classées cinquièmes au monde, les Canadiennes feront partie d’un groupe qui comprend aussi l’Espagne (4e), le Japon (9e) et la Hongrie (19e). Trois de ces équipes obtiendront leur billet pour Paris 2024.